Qu’est-ce que le recto d’une carte postale ?
Si l’on veut être précis et puriste, le recto d’une carte postale, c’est le côté portant la mention : carte postale, l’autre face constituant le verso.
De nos jours, la majorité des collectionneurs se préoccupent avant tout du verso pour l’illustration ou le cliché qui y figurent. Toutefois le recto des cartes ayant été modifié au fil du temps, il peut être utile de l’examiner, si l’on veut connaître approximativement la date d’édition d’une carte postale. Les cartes postales ayant été utilisées portent généralement les cachets de la poste. Il s’agit d’une première indication qu’il faut traiter avec précaution car certaines cartes peuvent avoir été utilisées bien des années après leur édition, mais ce cas est assez rare et en général l’utilisation d’une carte se situe dans les mois suivants sa parution.
Lorsqu’une carte postale n’a pas été utilisée, mais conservée à l’état neuf, le recto peut fournir également quelques informations. Ainsi les cartes postales antérieures à l’année 1904 ne comportaient au recto que l’emplacement destiné à noter l’adresse du destinataire (l’illustration et la correspondance étaient regroupées sur le verso). En voici un exemple classique :
Le language administratif
Cette situation va se trouver modifiée par un Arrêté du Ministre du commerce, de l’industrie, des postes et télégraphes, sur la proposition du sous-secrétaire d’Etat des postes et télégraphes en date du 16 mai 1904, qui stipule :
Art 1er – Le texte de l’arrêté du 18 novembre 1903 est remplacé par le texte suivant :
« Sont admises, dans la forme spécifiée ci-après, à circuler au tarif de 10 centimes lorsqu’elles satisfont d’ailleurs aux conditions de poids, de dimensions et autres, déterminées pour les cartes postales par les arrêtés ministériels des 24 novembre 1883, 5 octobre 1888, 30 avril 1889 et 22 mars 1902 (art.1), les cartes illustrées portant au recto, dans un espace aménagé à cet effet, des mentions de correspondances imprimées ou manuscrites : Les cartes dont il s’agit doivent porter au recto le titre imprimé « carte postale ».
Le recto doit être divisé, d’une manière très visible, par un ou plusieurs traits verticaux, en deux parties, portant imprimé en tête :
Celle de gauche, le mot « correspondance ».
Celle de droite, l’une des deux mentions « adresse » ou « adresse du destinataire ».
La partie de droite, destinée à recevoir l’adresse du destinataire, doit avoir une étendue au moins égale à la partie de gauche, qui peut être utilisée pour la correspondance.
Les cartes devront, en outre, porter au recto, soit sous le titre « carte postale » soit sous le mot « correspondance » l’indication : « Tous les pays étrangers n’acceptent pas la correspondance au recto (se renseigner à la poste) », ou tout autre indication équivalente.
Toutefois, jusqu’au 1er août prochain, l’inscription de la mention visée au paragraphe ci-dessus n’est pas obligatoire.
ART.2 – Par mesure transitoire, les cartes illustrées établies conformément aux dispositions de l’article 1er de l’arrêté du 18 novembre 1903, continueront a être admises, au même titre que les cartes postales illustrées visées, à l’article 1er du présent arrêté. »
C’est dans ce style très administratif et avec le souci du moindre détail, que cet arrêté a donné naissance à cette nouvelle présentation des rectos qui sont resté quasiment inchangés jusqu’à nos jours.
Panique dans la Seine Maritime
Mais en 1904 ces nouvelles dispositions furent mal assimilées par les revendeurs qui pouvaient penser que leur stock d’anciennes cartes postales était bon à jeter à la poubelle. Le Bulletin Général de la Papeterie, pour les rassurer publie en juin 1904 l’article suivant :
« Un certain nombre de marchands de cartes illustrées des villes d’eaux et des stations balnéaires, dont le stock est toujours considérable, s’étant émus de l’arrêté du 16 mai qui portait modification au modèle des cartes postales illustrées en vente divisant le recto en deux parties, l’une affectée à l’adresse, l’autre à la correspondance.
Les marchands de cartes illustrées croyaient que, désormais les anciennes cartes n’avaient plus cours ou bien qu’ils auraient à modifier eux-mêmes leur stock actuel. Une circulaire de M.BERARD met les choses au point. Elle est adressée aux directeurs des régions intéressées et est ainsi conçue :
« J’ai l’honneur de vous faire connaître que les dispositions de l’arrêté précité n’ont pas pour effet obligatoire une modification des cartes illustrées des types dont son actuellement approvisionnés les marchands. L’article 2 spécifie, en effet, que les cartes illustrées, disposées pour recevoir un texte de correspondance au recto (arrêté du 18 novembre 1903), continueront à être admises. D’un autre côté, il n’est rien changé aux dispositions antérieures concernant les cartes postales ordinaires servant à l’échange de correspondances.
L’arrêté du 16 mai a eu uniquement pour but la simplification de la réglementation existante et son extension aux relations franco-coloniales et internationales. Ses prescriptions ne portent nullement atteinte au commerce des cartes illustrées, dont mon administration a tenu, du reste, le plus grand compte.
Je suis persuadé qu’après un nouvel examen de la question les marchands de cartes illustrées de Dieppe, d’Eu et du Treport voudront bien reconnaître que la nouvelle réglementation sauvegarde aussi bien leurs intérêts que ceux de leurs clients, en ce sens qu’elle accorde des facilités et des avantages qui ne peuvent que favoriser le développement du commerce des cartes illustrées ». »
Les vendeurs ambulants de cartes postales à Dieppe
Ce n’est pas par hasard que M.BERARD qui fut secrétaire d’Etat aux Postes et Télégraphes du 10 juin 1902 au 25 octobre 1906, cite les marchands ce cartes postales de Dieppe, d’Eu et du Treport. Ces trois villes, dès les beaux jours venus attiraient de nombreux Parisiens qui venaient se détendre en fin de semaine. Le train reliant Paris à Dieppe avait été joliment surnommé : « le train de plaisir ». Tous ces touristes se répandaient dans les villes constituant un fort potentiel d’acheteurs de cartes postales, sachant qu’à cette époque le moindre déplacement provoquait l’envoi systématique de cartes à la famille et aux amis. Ce qui donne à penser que les grossistes et autres points de vente du secteur, habitués à de gros débits, devaient se constituer des stocks suffisamment importants.
Et si vous aviez oublié d’en envoyer, même en allant contempler la mer, les marchands ambulants ne manquaient pas de vous les mettre devant les yeux. Comme ici sur cette jetée de Dieppe où le promeneur n’a plus qu’à mettre la main à son porte-monnaie pour s’en procurer.
Il se pourrait qu’à force de contempler la mer et les allées et venues des bateaux vous ayez oublié le marchand de cartes postales qui vous guettait à l’entrée de la jetée. Qu’à cela ne tienne, vous n’échapperez pas à la ténacité du vendeur ambulant qui se promène avec son présentoir portatif sur le bras gauche et qui vous tend une carte postale de la main droite.
Où l’on découvre que mes nuits sont plus belles que vos jours
Nous venons de constater que les vendeurs de cartes postales s’accrochent aux bons emplacements comme les moules sur les rochers. Hors de question de laisser un espace vacant à la concurrence qui ne manquerait de s’y engouffrer. Mais vous en conviendrez, il faut quand même s’alimenter et se reposer au moins la nuit, afin d’être frais et dispo pour reprendre la tâche le lendemain. Et bien ce détail semble avoir échappé aux éditeurs de cartes postales qui avaient inventé ce que l’on peut appeler : « l’effet nocturne ». L’effet nocturne, consiste à utiliser un cliché réalisé en plein jour, à le coloriser en l’assombrissant, puis à rajouter des zones de lumière soit aux fenêtres des immeubles, soit comme c’est le cas ici, sur la lune, à l’intérieur du bec de gaz, et enfin dans la lanterne du phare et de tracer le rayon lumineux qu’il est censé diffuser. En un tour de main, voici « l’effet nocturne » réalisé. Or, il s’agit bien de nous faire prendre des vessies pour des lanternes, car on aperçoit, en pleine nuit le marchand de cartes postales et son étalage ! Il ne dormait jamais cet homme-là ! Et les clients choisissaient-ils leurs cartes postales à la pâle lueur du réverbère ?… Un petit chef-d’œuvre de Kitch.
Pour en revenir au recto des cartes postales ce que nous venons d’apprendre, c’est qu’à priori les cartes ne comportant pas la séparation adresse et correspondance au recto, ont été en principe éditées avant 1904. Mais sachant qu’entre le moment où la décision est imposée et celui où elle est réellement effective, il y a toujours une certaine marge de temps qui peut s’écouler, ceci doit nous inciter à la prudence en matière d’estimation. On doit rajouter également que la date d’impression d’une carte postale ne correspond pas obligatoirement avec la réalisation du cliché. Car les éditeurs ont parfois produits des cartes avec des clichés qu’ils gardaient en réserve depuis plusieurs années ou qu’ils avaient rachetés à des photographes ou à des confrères.
cartes postaleshistoire carte postale
Lesieur jean-marie
0 12 février 2019Bonsoir
J’ai lu avec intérêt votre article qui éclaircit un peu cette modification de « recto » (que j’appelai « verso ») car j’effectue des recherches approfondies sur les cartes postales pour mes articles sur le blog !
http://cctbelfort.canalblog.com/
Je suis le vice-président des Collectionneurs & Cartophiles du Territoire de Belfort.
Dans le passé, il me semble que l’on a correspondu…
Cordialement
Deflandre Christian
0 15 février 2019Merci de votre intérêt pour les cartes postales anciennes et pour la lecture de ce Blog du Musée de la Carte Postale. nous essayons de faire partager nos découvertes et nos connaissances au plus grand nombre. Cordiales salutations cartophiles, C.D.
Robak
0 5 mars 2019Bonjour,
Je m’interroge sur la date à laquelle mes parents ont reçu une carte postale, sous enveloppe) sur laquelle au recto , là où le timbre aurait pu être collé, sont inscrits CC 50.
Que signifie cette abréviation?
Je vous remercie par avance
DEFLANDRE
0 5 mars 2019Bonjour! et désolé, avec aussi peu d’informations (il faudrait au moins les scans recto et verso de la carte) il m’est impossible de répondre à votre question. Meilleures salutations. Christian DEFLANDRE
ANDRE HAMON
1 8 août 2019Bonjour, pourriez vous m’aider si vous connaissez la réponse à ma question.
que signifie le numéro accompagnant le légende sur les cartes postales anciennes.
comment définir l’éditeur entre 1889 et 1904 car je possède beaucoup de cartes sur Dunkerque (je collectionne que cette ville ou j’y ai vécu pendant 50 ans) certaines sont de LUZZATO d’autres FALCINY où encore FALCINY PHOT mais comment pouvoir affirmer les autres qu’elles sont bien de ces photographes éditeurs très connus dans le dunkerquois
merci pour votre aide et félicitations pour votre blog André
MARX Alain
1 10 mai 2020OK
MARX Alain
1 10 mai 2020OK parfait
PANISSOD Sylvie
1 22 juin 2020Bonjour et merci pour cette histoire des cartes postales bien documentée.
Je me permets de vous poser cette question :
j’ai une carte postale en noir et blanc représentant la rue de mon village, Divonne-les-Bains : il n’y a pas d’automobile, on distingue une carriole tirée par un cheval, un cantonnier + des poteaux électriques (l’éclairage public a été installé en 1901)
Le verso est divisé en deux, donc, selon vos informations elle date d’après 1903, mais elle a deux caractéristiques supplémentaires :
1 – un dessin publicitaire pour une lotion capillaire tout à gauche de la partie correspondance
2- un petit texte : « La correspondance au recto n’est pas acceptée par tous les pays étrangers, se renseigner à la Poste.
Y a-t-il moyen, avec ces détails, de dater cette carte ?
Merci, je vous souhaite une bonne semaine. Sylvie Panissod
Deflandre Christian
1 23 juin 2020Bonjour Mme. La seule chose dont on peut être sur c’est que cette carte a été imprimée après 1904. Les autres caractéristiques ne nous apportent rien de plus avec certitude.
Meilleures salutations
Guggenheim Raymond
0 4 janvier 2021Bonjour,
J’ai lu avec intérêt votre article sur le recto des cartes postales.
Je cherche (un peu désespérément) des références permettant de dater des cartes postales relativement récentes.
J’ai en effet commencé une mini collection (les recettes de pâté aux pommes de terre) et parfois des cartes sont à peine différentes les unes des autres.
Parmi les questions déjà résolues figurent, quand il est imprimé sur la carte, le nombre de chiffres du numéro de téléphone, ou l’apparition d’une adresse mail.
Mais d’autres indices figurent , comme parfois la mention « La Poste agrément n°125 », l’existence de cases ou de zones pour le code postal, la mention « ne pas écrire au dessous de cette ligne », ou l’existence de codes-barre, tant pour la référence de la carte qu’à l’emplacement de la zone à affranchir..
Vous serait il possible de m’indiquer quelques pistes ?
Avec mes remerciements anticipés
Deflandre Christian
0 6 janvier 2021Bonjour M.GUGGENHEIM,
Votre question est intéressante car elle vise à dater chronologiquement l’édition de cartes postales qui semble-t-il apparaissent comme étant des cartes éditées entre les années 1970 et nos jours. Je comprend bien votre problème il s’agit des mêmes cartes ayant l’objet d’édition et de réédition. Toutes les différences remarquées se situent du côté réservé à l’adresse. Il est normal que l’imprimeur de ces cartes se soit mis en conformité avec les exigences de la poste qui ont évoluées au fil du temps. Il y a donc deux pistes pour dater vos cartes. Soit avoir accès à la règlementation de la poste, ce qui me semble pas impossible, mais assez difficile quand même, car où , trouver le bon interlocuteur ? Soit chercher à savoir où et par qui ont été imprimées ces cartes postales. Si vous retrouvez l’imprimeur c’est en interrogeant celui-ci que vous obtiendrez les meilleurs résultats. Ces cartes étant relativement « récentes » il est possible d’obtenir les informations que vous recherchez auprès du personnel de cette imprimerie. Malheureusement je ne peux guère vous en dire plus, sinon que l’apparition des « cases » côté adresse, a fait suite à la création des codes postaux en France.
Cordialement Christian DEFLANDRE
Guggenheim
0 8 janvier 2021merci pour vote réponse rapide
cordialement
Raymond Guggenheim